L’expression أمّاه, prononcée Oumm-aah en arabe, échappe à toute traduction exacte. Au sens littéral, elle réfère à la figure de la mère, mais englobe aussi le lieu d’origine ou la terre physique.
Faisant appel à un procédé de stratification, technique et métaphorique, Haram traite l’image photographique comme lieu d’archivage d’une conscience personnelle, collective et universelle. En ce sens, son travail est un hommage à une culture, à un peuple et à une terre assiégés depuis de nombreuses décennies. Ses œuvres honorent aussi le sanglot des mères, des enfants et de la terre elle-même. Dans un acte de foi, Haram transforme les quatre murs de la galerie en sanctuaire.
Puisant dans trois corpus reliés, Haram juxtapose ici l’image documentaire à des œuvres mythiques conçues à partir de photographies prises lors d’un séjour en Palestine et d’images issues d’archives historiques, créant un recueil iconographique évocateur. Si chacune des images manifeste un sentiment palpable de perte, ensemble, elles surpassent le désir postcolonial d’accès à un territoire de réparation et de réconciliation. Avec cette élégie à sa Palestine natale, Eman Haram soulève des questions universelles concernant les origines, le déplacement, la dépossession. Elle déconstruit également nos idées préconçues entourant les symboles et l’imagerie photographiques.